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4 juin 2013 2 04 /06 /juin /2013 21:20

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  le 4 Juin 2013

 

"Familles, je vous aime"

 

Une phrase du discours de Jean-Marc Ayrault, hier, « sur la rénovation de la politique familiale », mérite d’être citée. Elle est tirée du préambule de la Constitution de 1946 : « La nation assure à l’individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement. » Et le premier ministre de poursuivre : « La nation, c’est l’État, les collectivités locales, les caisses d’allocations familiales, les associations, les entreprises. » Mais pourquoi diable seules les familles sont-elles mises à contribution ?

Non sans un brin de démagogie, quand on affirme encore que ce seront les plus aisées et qu’« il n’est pas normal qu’une famille aisée bénéficie d’un avantage très supérieur à celui dont bénéficie une famille modeste ». Sauf que le plafonnement du quotient familial va concerner nombre de couples de cadres et que « l’aménagement », comme il est dit élégamment, de la prestation jeune enfant touchera des couples avec un revenu de 3 250 euros par mois, qui perdront tout de même plus de 900 euros par an !

Oh, bien sûr ce n’est pas famille je vous hais, comme disait Gide, non, la famille on l’aime, on veut la protéger. Le 7 février dernier, a rappelé Jean-Marc Ayrault, « pour la réinstallation du Haut Conseil de la famille, je vous avais dit mon attachement à la famille et à ses valeurs, à la politique familiale française et à sa réussite ». Mais c’est la famille qui paiera.

Certes, le gouvernement, en renonçant à moduler les allocations familiales en fonction des revenus, semble avoir renoncé à porter atteinte à l’universalisme de la politique familiale hérité de la période de la Libération. Une atteinte d’autant plus problématique qu’en remettant en question une prestation sociale versée en lieu et place de l’impôt payé, il se serait ainsi attaqué au principe selon lequel c’est de l’impôt que procède la redistribution. Il reste cependant qu’avec la modulation du quotient familial, c’est bien la famille en tant que telle qui va devoir ouvrir sa bourse. Par le biais de l’impôt, certes, 
et cela fait indiscutablement une différence, mais il s’agit bien tout de même d’installer le fait comme l’idée que c’est au fond aux familles de supporter l’effort.

Il est vrai que le premier ministre a annoncé, 
en même temps, la création de 100 000 places en crèche, la scolarisation de 75 000 enfants de deux à trois ans supplémentaires, la création de 100 000 solutions d’accueil auprès d’assistantes maternelles, des mesures pour les familles monoparentales et celles sous le seuil de pauvreté. Mais si les mesures fiscales sont datées, celles-ci ne le sont pas et surtout qui va payer ? Les collectivités locales ? Avec pour effet de reporter sur l’impôt ces efforts supplémentaires ?

En réalité, si les annonces faites hier paraissent équilibrées, ce n’est pas le cas. Mais il y a en plus, dans ce choix de faire payer les familles, même « aisées », une sorte d’opération idéologique, amenant en quelque sorte à les rendre responsables du déficit de la branche famille, quitte à se serrer un peu la ceinture pour aider 
les familles les plus démunies. Mais outre que ce déficit est construit par le fait que la branche famille supporte des charges indues, l’ensemble de ces mesures fait entendre un silence assourdissant sur une vraie progressivité de l’impôt sur le revenu comme sur les cotisations des entreprises, dont Jean-Marc Ayrault 
dit pourtant qu’elles sont aussi la nation. Il est vrai 
que le Medef estime que les entreprises n’ont rien 
à voir avec la famille et ne devraient pas payer 
du tout. Une fois encore, s’il n’est pas totalement
 écouté, il semble avoir été entendu.

Maurice Ulrich

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