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16 février 2013 6 16 /02 /février /2013 17:13


  le 15 Février 2013

Par Jean-Paul Piérot

Inconscience d’un homme qui semble avoir largué les amarres avec le monde réel ? Provocation délibérée à l’égard des salariés en escomptant tirer un petit profit d’une opération de communication ? On se perd en conjectures en entendant le PDG de Renault proposer de différer à 2016 une partie… d’une partie de ses rémunérations, si les syndicats cèdent au chantage de la « compétitivité ».

« Compétitivité », qu’en termes élégants ces choses-là ne sont pas dites. Pour les salariés, il s’agirait, derrière ce mot à la mode, d’accepter de voir leur vie de famille bouleversée à la merci des desiderata des managers, de travailler plus sans que le salaire suive… Magnanime, le patron de Renault supprimerait plus de 8 000 emplois mais ne fermerait pas de site, les promesses n’engageant que ceux qui y croient. Carlos Ghosn a un sens bien particulier du partage des richesses et des efforts à consentir pour braver la tempête qui souffle sur l’industrie automobile française. Aux ouvriers payés au Smic ou à peine plus, sans treizième mois, de réduire leur train de vie, au patron de se contenter de 26 000 euros par jour au lieu de 36 000 ! À supposer même, ce dont il n’est pas question, que le PDG ne se contente que de la part fixe de son salaire, il encaisserait plus de 1,2 million d’euros, sans compter ses émoluments au titre de la direction de Nissan, et le reste.

La manœuvre du numéro un de la firme, dont l’État est toujours actionnaire, frappe par son cynisme et, effet de sa médiatisation, elle aura permis à des millions de gens d’apprendre que Carlos Ghosn perçoit des revenus dont chacun d’entre nous ne parvient même pas à concevoir l’ampleur. Le domaine de l’infiniment grand reste aux yeux d’un salarié ordinaire du registre de l’abstraction. Les salariés de PSA, menacés dans leurs emplois, éprouvent la même difficulté à imaginer la vie avec le salaire fixe de 1,3 million de leur PDG, Philippe Varin, qui a déclaré, gagné lui aussi par cet élan de générosité, abandonner la partie variable de ses émoluments le temps de faire avaliser la liquidation de l’usine d’Aulnay. Mais chez Renault comme chez PSA, et pas seulement, chacun comprend bien, même confusément, que ce monde marche sur la tête et qu’il convient dès lors de le remettre sur ses pieds. Chasser la droite du pouvoir fut un préalable nécessaire, mais non pas à soi seul suffisant. Au fait, Arnaud Montebourg pense-t-il toujours que la direction de Renault n’a pas franchi la ligne rouge ?

 

Carlos Ghosn

 

Salaire de Ghosn, le coup de communication de Renault

La proposition de Carlos Ghosn, PDG de Renault, de lier la baisse d'une part infime de son salaire à la signature de l'accord compétitivité par les syndicats, offre un contre-feu utile à la direction du groupe automobile. Pendant ce temps, personne ne posera la question du bien-fondé des suppressions d'emplois et de la flexibilité alors que Renault résiste plutôt bien à la crise et possède 13 milliards en caisse.

Interrogé sur France Info, Fabien Gache, délégué central CGT chez Renault,recadre les annonces financières de Renault. "2012 a été une des années les plus faibles pour le marché automobile. Malgré tout, Renault, réalise quand même 1,7 milliard de bénéfice. Le groupe s'est aussi désendetté de plus de 2 milliards d'euros avec une trésorerie qui dépasse les 13 milliards d'euros."

"Il n'y a pas lieu de vouloir imposer un accordqui va se traduire par des moins disants sociaux pour les salariés et qui ne permettra en aucun  cas à Renault de réaliser de meilleures ventes dans les années qui viennent. Je pense que cela remet en cause tout le discours tenu par la direction depuis des semaines qui est de dire que la situation est catastrophique du point de vue financier, qu'il faut coûte que coûte rogner la masse salariale. On voit bien là que l'on n'est pas dans une situation dramatique."

L'accord de compétitivité de Renault:8 260 suppressions d’emplois, augmentation moyenne de 6,5 % de la durée du temps de travail, quasi-gel des salaires pendant trois ans, mobilités forcées sous peine de licenciement

Renault a préféré ce jeudi souligné la baisse des ses bénéfices dans sa communication. Le groupe n'a en revanche pas mis en valeur son bénéfice net de 1,77 milliard d'euros (en baisse de 15%), alors que PSA Peugeot-Citröen vient de communiquer 5 milliards de pertes. Il ne s'est pas étendu non plus sur sa prévsion d'augmentation de ses ventes pour 2013.

Localisation industrielle

La communication du groupe est plutôt focalisée sur l'annonce du report de 30% de la part variable de la rémunération de Carlos Ghosn "de l'année 2012 au 31 décembre 2016", sous condition que l'accord de compétitivité soit signé par les syndicats. "Ca va aider mais ce n'est pas suffisant, a estimé le ministre du Redressement productif Arnaud Montebourg sur Europe 1. L'essentiel, c'est d'abord la politique de localisation industrielle de Renault."

Jean-Claude Mailly a débusqué le lièvre. "Ca ne va pas perturber (Carlos Ghosn) fortement sur l'ensemble de ses gains. Il faut relativiser tout cela... Je pense que là aussi, ça fait partie de la "com"."

1,5 million de salaire variable sur 12 millions de gains! En 2011, la part variable du salaire de Carlos Ghosn en tant que PDG de Renault était de 1,59 million d'euros et la part fixe de 1,23 million. Mais il a aussi reçu  9,94 millions d'euros de salaire en sa qualité de patron de Nissan.

 

Par Jean-Paul Piérot

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